CONGES PAYES DANS L’ENTREPRISE : AVEZ-VOUS ORGANISE LA PRISE DES CONGES PAYES SUR 2022/2023 ?

code du travail

Dans un grand nombre d’entreprises, le plus souvent non dotée de CSE, la prise des congés se fait de manière très informelle. Le salarié demande des congés, souvent oralement, et la Société les accorde ou non au cas par cas, l’accord sur les congés pouvant rester verbal.

 

En dehors de la période estivale, les salariés ont tendance à solliciter des congés en dernière minute, voire, a posteriori, pour couvrir une absence qui n’était pas prévue.

 

Mais, en cas de refus de congés à un salarié, et de réclamation de sa part à ce titre, cette absence de formalisme a toutes les chances de se retourner contre l’employeur, qui, il l’oublie souvent, est tenu par le Code de Travail et souvent la convention collective, à un certain nombre d’obligations strictes en la matière.

 

Et c’est au mois de février que tout se joue la plupart du temps pour les entreprises qui n’ont pas aligné la période de prise des congés sur l’année civile.

 

Nous sommes à la fin du mois de février 2022. Avez-vous pensé à préparer la prise des congés payés de vos salariés sur l’exercice 2022/2023 ?

 

Si c’est fait, c’est parfait. Pour les autres, il est peut-être encore (tout juste) temps.

 

Que faut-il faire ?

 

En préalable à toutes démarches :

 

Pour les entreprises qui ne sont pas dotées d’un accord d’entreprise ou d’établissement sur ces questions, mais qui sont soumises à une convention collective, il convient de faire le point rapidement sur les dispositions de la convention collective qui s’appliquent en matière de congés payés (période de prise des congés, fixation de l’ordre des départs en congés…).

 

Il faudra alors les respecter avec attention.

 

A défaut d’accords collectifs, ce sont les dispositions supplétives du Code du Travail qui s’appliqueront.

 

1/ ETAPE 1 : Informez vos salariés de la période sur laquelle ils pourront prendre leurs congés

 

Par application des articles L3141-15 et L3141-16 du Code du Travail, il faut d’abord que l’employeur fixe ou, a minima informe, les salariés de la période de prise des congés payés des salariés, c’est-à-dire la période où les salariés pourront poser leurs congés acquis sur l’exercice précédent (ou pris par anticipation).

 

Cette période peut être fixée par accord d’entreprise, d’établissement ou à défaut par accord de branche (convention collective).

 

Exemple : La convention collective des services de l’automobile (article 6) prévoit que la période de prise des congés payés est fixée du 1er juin au 31 mai de l’année suivante.

 

Si rien de contraignant n’est prévu dans les accords collectifs, alors c’est à l’employeur de fixer cette période, après avis du CSE s’il y en a un.

 

Attention : cette période doit inclure obligatoirement la période du 1er mai au 31 octobre de chaque année (pour permettre la prise des congés « d’été »).

 

La période de prise des congés ainsi définie doit être portée à la connaissance des salariés au moins deux mois avant son ouverture (par note de service), sous peine de devoir indemniser le salarié qui n’aurait pas pris ses congés.

 

Dans la mesure où, de manière fréquente, la prise d’effet de la période des congés est fixée au 1er mai, l’information doit donc, dans ces entreprises, être transmise aux salariés avant le 1er mars.

 

Dans ce cadre, il est possible, si la convention collective l’autorise, de prévoir :

 

  • Soit une période pour la prise de congé dit principal, dont la durée légale est égale à 24 jours ouvrables ou 20 jours ouvrés (schématiquement les congés d’été), et une autre pour la prise de la 5ème

 

Souvent, ces périodes seront fixées comme suit :

 

*Période de prise du congé principal du 1er au 31 octobre,

*Période de prise de la 5ème semaine du 1er novembre au 30 avril de l’année suivante 

 

  • Soit, pour favoriser l’étalement des congés, une période unique allant du 1er mai au 30 avril de l’année suivante pendant laquelle le salarié peut prendre l’ensemble de ses jours de congés payés correspondant à son congé principal et à la 5ème

 

Fermeture de l’entreprise ou congés par roulement ?

 

Au moment de la définition de la période de la prise des congés, l’employeur doit déterminer si les congés se prendront uniquement par roulement, ou si des périodes de fermeture de l’entreprise seront fixées.

 

Ainsi, l’employeur peut décider, après consultation du CSE s’il en est doté, que les congés payés annuels seront pris pendant la période de fermeture de l’entreprise (en principe, pour une durée maximale de 24 jours ouvrables s’agissant du “congé principal” pris entre le 1er mai et le 31 octobre).

 

L’ensemble du personnel partira donc en congés à la même date et pour la même durée.

 

Exemple : fermeture de l’entreprise trois ou quatre semaines en août et/ou une semaine pendant les fêtes de fin d’année.

 

Les deux modalités peuvent être combinées : fermeture de la Société trois semaines en août, les autres congés se faisant par roulement.

 

Outre la consultation du CSE, il faut s’assurer que les règles éventuellement fixées pour la fermeture de l’entreprise par la convention collective applicable sont bien respectées.

 

Et s’assurer que l’information des salariés des périodes de fermeture est bien effectuée deux mois avant le début de la période des congés, soit, la plupart du temps, avant le 1er mars de l’année en cours.

 

Cette règle est par exemple rappelée par la convention collective Syntec (article 25).

 

Attention aux jours de fractionnement

 

Le congé principal (24 jours ouvrables ou 20 jours ouvrés) est pris en principe sur la période du 1er mai au 31 octobre, la 5ème semaine étant « libre ».

 

Si le salarié est autorisé à prendre une partie de son congé principal en dehors de cette période du 1er mai au 31 octobre, il aura droit alors à des jours supplémentaires dits « de fractionnement » (article L3141-21 et L3141-23 du Code du Travail sous réserve des dispositions prévues par un accord d’entreprise ou une convention collective).

 

Sauf autres dispositions prévues par la convention collective, ces jours supplémentaires sont accordés dans les conditions suivantes :

  • 1 jour ouvrable si le salarié prend entre 3 et 5 jours du congé principal en dehors de la période 1er mai / 31 octobre ;
  • 2 jours ouvrables s'il prend 6 jours minimum de congés en dehors de cette période.

Exemple : si les salariés peuvent prendre leurs congés au 1er mai au 30 avril, donc sur toute l’année, et que le salarié prend trois semaines en août, une semaine à Noël et une semaine en avril, il aura droit à deux jours de congés payés supplémentaires.

Cependant, sauf disposition contraire prévue par la Convention Collective, il est possible de faire renoncer au salarié au bénéfice des jours de fractionnement.

 

Si cette renonciation n’est pas prévue dans les contrats de travail des salariés, il faudra, au moment de la fixation de la période de prise des jours de congés, prendre en compte ce point, et organiser, le cas échéant, la renonciation par les salariés à leurs jours de fractionnement.

 

 

2/ETAPE 2 – DEPART EN CONGES PAR ROULEMENT

 

Le mois de février a pu être mis à profit pour commencer à solliciter les vœux des salariés, par écrit, pour leurs congés payés afin de fixer l’ordre des départs en congés le moment venu lorsque les congés se font par roulement, en particulier l’été.

 

Cette phase peut se prolonger au mois de mars.

 

L’ordre des départs en congés (fixation des dates de vacances) est fixé par accord d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, par accord de branche (convention collective).

 

A défaut d’accord réglant cette question, cet ordre est défini, par l’employeur après avis du CSE et en tenant compte de certains critères fixés par la convention collective et/ou par la loi, et en particulier (article L3141-16 du Code du Travail) :

 

  • la situation de famille des bénéficiaires, notamment les possibilités de congé, dans le secteur privé ou la fonction publique, du conjoint ou du partenaire lié par un pacte civil de solidarité,
  • la présence au sein du foyer d'un enfant ou d'un adulte handicapé ou d'une personne âgée en perte d'autonomie ;
  • la durée de leurs services chez l'employeur ;
  • leur activité chez un ou plusieurs autres employeurs.

D’autres éléments à prendre en compte peuvent être prévus par la convention collective applicable.

À noter que si le salarié peut émettre des souhaits, l’employeur reste seul décisionnaire sur les dates de congés, dès lors que les critères visés ci-dessus sont pris en compte.

 

En principe, suivant le Code du Travail, les dates de vacances du salarié doivent lui être communiquées au moins un mois avant son départ.

 

A défaut, l’employeur peut être tenu d’indemniser le salarié qui n’aurait pas pris ses congés.

 

En conséquence, lorsque la période de prise des congés débute le 1er mai, l’ordre des départs en congés doit, en principe, avoir été établi et communiqué aux salariés avant fin mars.

 

Cependant, certaines conventions collectives dont la Syntec imposent de faire connaître l’ordre des départs en congés deux mois avant la date du départ, ce qui impose de fixer cet ordre en amont et idéalement à la fin du mois de février, pour les salariés qui souhaiteraient partir dès le 1er mai.

 

Les salariés doivent alors se faire confirmer par écrit leur date de congés.

 

Il convient donc de recueillir les vœux des salariés en amont lorsque les départs se font par roulement (et non en une seule fois comme c’est le cas en cas de fermeture de la Société).

 

***

De plus en plus de sociétés ont tendance à ne plus respecter strictement ces règles qui paraissent très rigides et contraignantes, alors que les salariés aspirent, eux-mêmes, à une certaine souplesse pour le permettre de partir en vacances au dernier moment, ou de prendre des congés d’un jour ou deux pour des contraintes personnelles de dernière minute.

 

Il n’est pas rare ainsi qu’une semaine ou deux de congés soient totalement fractionnées à la demande du salarié et prises au fil de l’eau en fonction des besoins.

 

Attention cependant.

 

Les règles fixées par le Code du Travail concernant la prise des congés payés par les salariés sont pour certaines pénalement sanctionnées (article R3143-1 du Code du Travail).

 

Par ailleurs, les salariés qui n’auraient pas pu prendre leurs congés pourraient engager la responsabilité de leur employeur qui n’aurait pas respecter les règles applicables.

 

De même, une fermeture d’établissement qui n’aurait pas été portée à la connaissance des salariés en temps et en heure risquerait d’avoir des conséquences pour l’employeur.

 

Si une certaine souplesse peut être conservée pour la 5ème semaine de congés payés, voire quelques jours du congé principal, il paraît important de finaliser rapidement les étapes indispensables de la prise des congés de l’exercice 2022/2023 en informant, à tout le moins, les salariés (après le cas échéant avoir procédé à la consultation du CSE) de la période de prise des congés payés incluant, le cas échéant, les périodes de fermeture de l’entreprise.

 

Aurélia MAROTTE

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